To love a rat Shadow stories and interspecies relations in a Cambodian minefield
Auteur : De Angelo, Darcie
Sous la direction de : Margaret Stevenson
Université McGill
English text
Mots clés : Anthropologie, Cambodge, Mines, Démineurs, Rats, ONG.
Résumé
Il y a environ quatre à six millions de mines enfouies dans les sols du Cambodge, laissées derrières à la suite des guerres pourtant terminées depuis plusieurs décennies. Dans cette recherche, j’ai réalisé un terrain ethnographique avec des démineurs cambodgiens qui traversent quotidiennement ces sols instables. En examinant ces champs de mines comme lieu de travail, j’ai compris que la violence potentielle des champs de mines ne se limitait pas aux explosifs enfouis dans le sol – elle intégrait aussi un passé qui a laissé des traces dans le présent à travers des ennemis passés, des esprits dangereux et la surveillance étatique. Quelques démineurs ont installé des mines lorsqu’ils étaient soldats ; ils utilisent aujourd’hui ces compétences militaires pour la paix dans le travail de démineur. Certains d’entre eux ont en fait combattu pour l’armée adverse durant les conflits au Cambodge. À l’image des mines enfouies au sol, cette violence a été dissimulée, alors qu’elle s’est immiscée dans la vie de ces personnes. Les démineurs que j’ai rencontrés modèrent leur discours et communiquent une forme d’incertitude en regard des violences potentielles du gouvernement actuel, des esprits, et de leurs collègues. Ils m’ont raconté des histoires de violence indirecte, ponctuées d’indices transversaux et obliques évoquant leurs suspicions et les dangers potentiels qui nous entouraient. Contrastant avec ces suspicions indirectes qualifiant leur relation à l’état, aux superviseurs, collègues et esprits, les démineurs démontraient clairement une relation affective pour une nouvelle innovation technologique : les rats démineurs. En 2015, grâce à un partenariat entre une ONG et l’état, cette nouvelle méthode de détection des mines a été établie au Cambodge. Travaillant en pairs, les démineurs enseignent aux rats géants gambiens comment retrouver les mines sur des sections sans risques pour qu’ils puissent ensuite les déceler dans des terrains toujours minés. Les humains démineurs aimaient les rats démineurs. Mais cet amour a aussi des secrets. Dans cette thèse, je démontre comment le passé violent resurgi de manière oblique et transversale dans le présent. Dans un contexte où la violence et la culpabilité n’ont pas été adressées directement, j’interroge comment l’amour pour les rats peut « rendre une personne cruelle gentille » ou, d’une certaine manière, médier le passé violent.
