Diversité des hominines dans l’archipel ouest indonésien au Quaternaire : une perspective donnée par l’étude du registre fossile dentaire
Auteur : Noerwidi, Sofwan
Sous la direction de : François Sémah et Carlos Lorenzo Merino
Muséum national d’histoire naturelle, Paris
English text
Mots clés : Paléonthologie humaine, Indonésie, Homo erectus, Homo sapiens, Meganthropus, Sundaland, Diversité, Morphométrie, Dents fossiles, Homme — effets de l’environnement — Evolution, Variabilité génétique, Civilisation — Indonésie
Résumé
La partie ouest des îles de l’archipel indonésien est l’un des points chauds paléoanthropologiques. Au cours du Quaternaire, il a été impacté par les changements climatiques et du niveau de la mer, qui pourraient avoir affecté les dispersions et / ou l’isolement des hominines dans cette région. Cette étude vise à évaluer la diversité des humains préhistoriques du Sundaland (Sumatra et Java) à partir de collections dentaires. Nous avons étudié 715 dents supérieures et inférieures, dont 290 dents d’hominines du Pléistocène et 425 dents d’Homo sapiens holocènes. Cette étude était basée sur la caractérisation morphologique et métrique des dents, y compris la morphologie comparative, les mesures classiques, la taille de la couronne et les proportions des cuspides, et la morphométrie géométrique 2D. Les quatre approches de l’analyse comparative métrique et non métrique développées dans cette recherche nous ont permis de distinguer six groupes dentaires : groupe 1 type « Meganthropus », groupe 2 type « Mojokertensis », groupe 3 type « Sangiran », groupe 4 type « Wajak », groupe 5 type « Prénéolithique » et groupe 6 type « Néolithique-Paléométallique ». De plus, nous avons observé que la diversité de l’expression des caractères dentaires dépassait la distribution chronologique des échantillons. En d’autres termes, la diversité dentaire ne suit pas strictement la chronologie, ce qui signifie que la variabilité est plus élevée que ce qui était attendu. Entre le Pléistocène inférieur (1,6 Ma) et la limite du Pléistocène moyen (0,9 ma), il existe trois groupes d’hominines représentés par les fossiles de la Formation de Pucangan et de la couche de Grenzbank. Le groupe 1 « Meganthropus » montre une taille très robuste et une complexité morphologique occlusale qui pourraient être liées à certains premiers hominines africains. Le type « Mojokertensis » du groupe 2 et le type « Sangiran » du groupe 3 ont tous deux montré des complexités morphologiques de la surface occlusale qui indiqueraient leur appartenance à une même lignée. Basée sur des différences avec le groupe 1 mais sur la proximité des groupes 2 et 3, cette étude présume une continuité biologique entre les hominines du Pléistocène inférieur (Pithecanthropus) au Pléistocène moyen (Homo erectus), mais probablement un écart ou une discontinuité avec le Meganthropus du groupe 1. Notre série comparative de dents du site de Zhoukoudian en Asie continentale s’est retrouvée, dans nos analyses, séparée dans les groupes 2 et 3 prouvant qu’il pourrait y avoir un contact génétique entre des groupes d’Asie du Sud-Est insulaire et d’Asie continentale pendant le Pléistocène moyen. Les membres du type « Wajak » du groupe 4 relevant, pour les plus anciens, du début du Pléistocène moyen (0,78 Ma) pourraient être identifiés comme nouveaux venus en raison de leurs différences morphologiques avec le groupe 2 et groupe 3. Étant donné l’extension chronologique des individus compris dans ce groupe 4, comprenant Punung hominin (115 ka), Lida Ajer (73-63 ka) et ’Homo wajakensis’ (37,4-28,5 ka), il semble avoir perduré au-delà du changement climatique spectaculaire, du Pléistocène moyen au Pléistocène supérieur. Le type prénéolithique du groupe 5 (populations de Sumatra et de Java) pourrait avoir évolué à partir de la lignée précédente du groupe 4. Certains caractères dentaires (simplification du schéma occlusal, réduction de taille) seraient le résultat de l’isolement et de l’adaptation à un environnement insulaire provoqué par le maximum interglaciaire de 8,5 ka. Les membres du groupe 6 « Néolithique-Paléométallique », à la fin de l’Holocène depuis 3,2 ka, montrent une différence remarquable dans les caractères dentaires menant à l’hypothèse de nouveaux arrivants d’Asie continentale, se croisant également avec les indigènes du groupe 5. Deux flux génétiques, de le nord et l’ouest de l’Asie du Sud-Est correspondent aux dispersions Austronésiennes et Austroasiatiques.